CONSEIL CONSTITUTIONNEL
DECISION QPC DU 8 JUILLET 2011 SUR LA COMPOSITION DU TRIBUNAL POUR ENFANTS
Par cette décision, le Conseil constitutionnel s’est prononcé sur la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des textes relatifs à la composition du tribunal pour enfants et à sa présidence.
La présence majoritaire d’assesseurs non magistrats au sein du Tribunal pour enfants n’est pas contraire à la constitution.
Le demandeur estimait que la présence majoritaire d’assesseurs non magistrats au sein du tribunal pour enfants était inconstitutionnelle.
Le Conseil dans ses différents considérants rappelle que l’article 66 de la Constitution « Nul ne peut être arbitrairement détenu. L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi » n’interdit pas que le pouvoir de prononcer des mesures privatives de liberté soit exercé par une juridiction pénale de droit commun au sein de laquelle siègent des juges non professionnels.
Toutefois, il précise qu’en ce cas, des garanties appropriées doivent être apportées permettant de satisfaire au principe d'indépendance, indissociable de l'exercice de fonctions juridictionnelles, ainsi qu'aux exigences de capacité, qui découlent de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; et que s’il s'agit des formations correctionnelles de droit commun, la proportion des juges non professionnels doit rester minoritaire.
Mais que d'une part, qu'en vertu de l'article L. 251-1 du code de l'organisation judiciaire, le tribunal pour enfants est une juridiction pénale spécialisée qui connaît, dans les conditions définies par l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante, des contraventions et des délits commis par les mineurs et des crimes commis par les mineurs de seize ans ; et que, dès lors, le fait de prévoir que siègent dans cette juridiction, en nombre majoritaire, des assesseurs non professionnels, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles précitées ;
Et que d’autre part, l'article L. 251-4 prévoit que les assesseurs sont nommés pour quatre ans et choisis parmi les personnes âgées de plus de trente ans, de nationalité française et qui se sont signalées par l'intérêt qu'elles portent aux questions de l'enfance et par leurs compétences ; que l'article L. 251-5 précise qu'ils prêtent serment avant d'entrer en fonction ; que l'article L. 251-6 dispose que la cour d'appel peut déclarer démissionnaires les assesseurs qui sans motif légitime, se sont abstenus de déférer à plusieurs convocations successives et prononcer leur déchéance en cas de faute grave entachant l'honneur ou la probité; que, dans ces conditions, s'agissant de ces fonctions d'assesseurs, les dispositions contestées ne méconnaissent ni le principe d'indépendance indissociable de l'exercice de fonctions judiciaires ni les exigences de capacité qui découlent de l'article 6 de la Déclaration de 1789 ; que, par suite, l'article L. 251-4 du code de l'organisation judiciaire, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, est conforme à la Constitution.
Le Conseil relève un grief d’office sur la présidence du tribunal pour enfants et déclare l'article L. 251-3 du code de l'organisation judiciaire contraire à la Constitution
La présidence du tribunal pour enfants, confiée par l’article L. 253-1 du COJ au juge ayant instruit l’affaire, le conseil a entendu préciser « la portée du principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs » ce qui le conduit à opérer une distinction entre éducatif et répressif pour apprécier le cumul de fonctions au regard du principe d’impartialité.
Ainsi, il considère que le principe d'impartialité des juridictions ne s'oppose pas à ce que le juge des enfants qui a instruit la procédure puisse, à l'issue de cette instruction, prononcer des mesures d'assistance, de surveillance ou d'éducation ; mais que, toutefois, en permettant au juge des enfants qui a été chargé d'accomplir les diligences utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et qui a renvoyé le mineur devant le tribunal pour enfants de présider cette juridiction de jugement habilitée à prononcer des peines, les dispositions contestées portent au principe d'impartialité des juridictions une atteinte contraire à la Constitution.
Il déclare donc l'article L. 251-3 du code de l'organisation judiciaire contraire à la Constitution.
La conséquence de cette inconditionnalité aurait pour effet d’abroger immédiatement l'article L. 251-3 du code de l'organisation judiciaire et donc entraînerait la suppression de la juridiction compétente pour connaître de la responsabilité pénale des mineurs.
Comme ces conséquences sont manifestement excessives, dans ces conditions, le Conseil reporte la date de cette abrogation au 1er janvier 2013 afin de permettre au législateur de mettre fin à cette inconstitutionnalité.